Haïti déchirée : la tragédie silencieuse des déplacés internes

Haïti déchirée : la tragédie silencieuse des déplacés internes

Haïti traverse aujourd’hui l’une des plus graves crises de déplacement interne de son histoire récente. En 2024, plus d’un million de personnes ont été contraintes de fuir leurs foyers, un chiffre qui a triplé en un an seulement. Cette flambée dramatique découle d’une violence armée extrême orchestrée par des gangs, d’une incapacité structurelle de l’État à protéger ses citoyens, et d’un exode aggravé par les expulsions internationales.

Le dernier rapport des Nations Unies (S/2025/356) révèle que 1 041 000 Haïtiens ont été déplacés à l’intérieur du pays en 2024, contre environ 315 000 en 2023. Ce déplacement massif n’est pas un simple mouvement ponctuel ou volontaire : il s’agit d’une fuite pour survivre à des attaques armées, des massacres, et des incendies criminels, en particulier dans les zones de Port-au-Prince et de l’Artibonite.

Les enfants sont les plus touchés par cette crise. Selon l’UNICEF, plus d’un enfant sur huit en Haïti est aujourd’hui déplacé, constituant plus de la moitié des personnes concernées. Privés d’accès à l’eau potable, à l’alimentation, aux soins médicaux et à l’éducation, leur situation est alarmante. À Kenscoff, par exemple, une attaque du gang Viv Ansanm fin janvier 2025 a forcé plus de 3 100 personnes à fuir, tandis qu’à Wharf Jérémie, 207 personnes ont été assassinées, principalement des personnes âgées.

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L’État haïtien, quant à lui, est presque absent des zones touchées. La police nationale (PNH) intervient rarement, souvent avec un retard de plusieurs heures, comme à Kenscoff où elle est arrivée cinq heures après le début des violences. Les sites d’accueil des déplacés, visités par les experts de l’ONU, témoignent de conditions indignes : surpopulation, absence d’assainissement et insécurité sanitaire. Aucune réponse d’urgence à grande échelle n’a été mise en place.

Enfin, l’aggravation de la crise est alimentée par les expulsions de ressortissants haïtiens, notamment des États-Unis, de la République dominicaine et des Bahamas. Ces déportés, souvent sans ressources, rejoignent les rangs des déplacés internes, alors que leurs quartiers d’origine sont devenus invivables ou contrôlés par des gangs.

Sans une intervention internationale coordonnée, cette crise humanitaire majeure risque de s’intensifier en 2025, menaçant la stabilité politique, économique et sociale du pays.

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